Transfert de siège intra européen

Initialement, la libre circulation des personnes concerne surtout les personnes physiques, hommes et femmes et non les sociétés ou les organismes dotés de personnalité morale, mais le droit européen et sa jurisprudence ont évolué, offrant désormais autant de liberté de circulation aux personnes morales.  

Pour les sociétés, quitter son pays est-il synonyme de perte de personnalité morale ?  

La réponse a été consacrée dans un arrêt Daily Mail du 27 septembre 1998 (affaire 81/87) dans lequel la Cour a posé un principe de libre transfert du siège social, sans que la société perde « la personnalité juridique dont elle jouit dans l’ordre juridique de l’Etat membre de constitution et, le cas échéant les modalités de ce transfert sont déterminées par la législation nationale conformément à laquelle ladite société a été constituée ».   

Mais nuance apportée dès 2008 dans un arrêt Cartesio du 16 décembre (affaire C-210/06), où l’on distingue désormais selon que le transfert du siège d’une société est « constituée selon le droit d’un Etat membre dans un autre Etat membre sans changement du droit dont elle relève [et] celui relatif au déplacement d’une société relevant d’un Etat membre vers un autre Etat membre avec changement du droit national applicable, la société se transformant en une forme de société relevant du droit national de l’Etat membre dans lequel elle se déplace ». 

Ainsi l’Etat de création est le seul compétent pour déterminer la loi qui commande le rattachement de cette société à son ordre juridique. 

En 2012, la Cour de justice de l’Union européenne, a rappelé cette primauté du principe de la liberté d’établissement sur le droit national et juge qu’une différence de traitement entre transformation interne et transformation transfrontalière est constitutive d’une restriction non justifiée à l’exercice de la liberté d’établissement. 

Il faut aussi préciser que si l’Etat membre autorise le transfert de siège réel aux sociétés initialement constituées en conformité avec les exigences de son ordre juridique national, l’Etat d’accueil ne peut pas invoquer sa propre législation pour interdire à cette société le transfert de siège réel sauf à contrevenir aux traités. 

Il est également possible pour une entreprise d’avoir un siège statutaire dans un Etat membre, de le laisser dans celui-ci et de transférer son siège réel dans un autre Etat membre sans qu’il s’y oppose en invoquant son droit national, tel que consacré par l’arrêt Überseering du 5 novembre 2002 (affaire C-208/00).  

Dans cet arrêt la loi allemande interdisait à une société régulièrement immatriculée au Pays Bas de transférer uniquement son siège réel en Allemagne alors qu’elle gardait sa qualité de société au Pays Bas au regard des règles néerlandaises. Cette disposition a été considérée comme contraire à la liberté d’établissement… 

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